Contribution de Thierry Afschrift dans l’Ecofin Mag N°8. Cliquez ici pour consulter l’article


L’initiative du président américain en matière fiscale risque d’avoir des répercutions très importantes. L’on rappellera qu’il souhaite obliger tous les États de la planète à appliquer un taux d’impôt des sociétés d’au moins 21 %, du moins pour toutes les sociétés multinationales. Il espère ainsi mettre fin à l’activité des paradis fiscaux, devenus inutiles.

Bien entendu, un système qui favorise les recettes fiscales des États plaît en général à la plus grande partie des autres, enchantés d’un accord permettant d’augmenter les recettes. Les politiciens, en général, savent qu’augmenter les recettes leur permet de financer des politiques qui peuvent les rendre populaires, tandis que la diminution des dépenses a rarement le même effet. Le prétexte est en plus idéal, dans une période où les États sont terriblement endettés à force de casser l’activité économique pour un motif discutable, de lutte contre la pandémie.

Et bien sûr ce sont les grands États, ceux qui disposent d’un marché intérieur important, qui ont le plus applaudi à cette mesure. Celle-ci risque en effet de faire mal, non seulement aux

paradis fiscaux, mais aussi aux États plus petits, comme en Europe la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas, ou encore l’Irlande, qui, faute d’un attrait économique comparable, ont toujours eu tendance à attirer les investissements étrangers en leur accordant des avantages fiscaux.

Peut-être plus que les paradis fiscaux, ce sont ces États-là, qui risquent d’être victimes de la réforme. Ils ont de plus peu de possibilités de s’y opposer effectivement, parce que, sous couvert de multilatéralisme, c’est en réalité la loi du plusfort que l’on essaye de leur imposer.

En l’occurrence, c’est la concurrence fiscale que Joe Biden veut détruire. Cela peut sans doute nuire aux sociétés multinationales, objet direct de la mesure envisagée, mais aussi à toutes les autres entreprises, et à toutes les personnes capables de créer de la richesse. Il

faut en effet s’attendre à ce que des dispositions qui empêchent la concurrence entre États en matière fiscale finissent par jouer également pour les petites sociétés. S’il n’y a plus de concurrence fiscale, il n’y a plus rien pour empêcher les États d’augmenter sans cesse les impôts.

Ce que les États-Unis, et l’Union Européenne, souvent champions de la « lutte anti-trust », proposent, c’est en réalité un cartel d’Etats contre les entreprises. Rien de tel, pour empêcher celles-ci de choisir une localisation plus avantageuse, que d’entraver la concurrence, ici fiscale pour fixer les « prix » (en l’espèce le niveau des impôts) à un niveau aussi élevé que possible.

Le recours à ce système est d’autant moins justifié qu’en réalité le niveau de taxation des sociétés n’a jamais diminué au cours des

dernières années. Certes, certains taux d’impôts ont parfois été réduits, mais c’est en général une situation compensée par un élargissement de la base imposable.

Ce qu’on veut faire aujourd’hui, c’est au contraire augmenter encore les charges fiscales sur les entreprises.

Thierry Afschrift